L' immigration flamande en Wallonie fut un phénomène important dans l'histoire de la Belgique. Environ 500 000 Flamands migrèrent pour s'établir en Wallonie. Selon Kas Deprez (1945-2000) sociolinguiste, professeur au département de philologie germanique de l'Université d'Anvers, la Révolution industrielle n'a quasiment aucune incidence en Flandre. Les Flamands immigrèrent vers la Wallonie (et d'autres régions) pour fuir la pauvreté.
En voyant la Flandre riche d'aujourd'hui, il est difficile d'imaginer qu'elle a connu des périodes de famine, de misère et d'analphabétisme. (En Wallonie aussi, vers 1850, des contrées moins prospères ont connu une émigration de Wallons vers les États-Unis : Wallons au Wisconsin - Green Bay et péninsule de Door - et Michigan, et appelés Belgo-Américains).
Les chiffres des recensements linguistiques organisés par le gouvernement belge entre 1866 et 1910 (faisant partie du recensement décennal) et publiés par l'historien wallon Yves Quairiaux révèlent l'ampleur de ce phénomène économique.
Le travail dans les mines
Jusqu’en 1965 environ, c’est la Wallonie qui était plus prospère que la Flandre. Par centaines de milliers des Flamands essayaient d’échapper à la pauvreté en s’installant en Wallonie. C’est en particulier la crise agricole des années 1870, la deuxième révolution industrielle (vers 1890) et la crise économique des années 1930 qui ont attiré en Wallonie de nombreux Flamands. Certains s’y sont installés de façon permanente, d’autres faisaient la navette toutes les semaines, ou même tous les jours (migration pendulaire, dite navette en Belgique et au Québec) et combinaient leur travail en Wallonie avec une petite exploitation agricole familiale. Au fil du temps, avec le développement du réseau ferroviaire, davantage ont préféré faire la navette plutôt que s’installer en Wallonie de façon permanente.
À partir des années 1930, les travailleurs flamands en Wallonie ont dû affronter la concurrence croissante des étrangers (notamment italiens, nord-africains et polonais). L’exploitation des mines du Limbourg, en Flandre, a attiré plutôt les Flamands, et les emplois créés alors en Wallonie ont été occupés presque exclusivement par des étrangers. Si l’émigration concernait toutes les provinces flamandes, la destination différait, non éloignée si possible. Les Limbourgeois et les habitants du Hageland (dans l'est du Brabant flamand) et du sud de la Campine (Zuiderkempen) s’installaient surtout à Liège et, dans une moindre mesure, à Charleroi, tandis que les travailleurs de Flandre occidentale choisissaient principalement le Hainaut (et le Nord de la France).
Ampleur de l'immigration flamande vers la Wallonie sur base des recensements linguistiques de 1866-1910
Ces recensements linguistiques fixaient par commune la connaissance de la langue (flamand (maintenant néerlandais), français ou allemand) de ses habitants. pour estimer le nombre de Flamands en Wallonie, Yves Quairiaux considère que ceux-ci, à cette période, parlaient flamand ou étaient bilingues (flamand-français). Il ne fallut pas longtemps avant qu'ils n'intègrent la culture et la langue locale (et davantage le wallon ou le picard que le français, sûrement au début).
Ces données proviennent de chiffres officiels publiés dans le Moniteur belge. En cumulant les chiffres des arrondissements situés le long de la frontière linguistique, les communes à majorité néerlandophone à cette époque sont considérées comme faisant partie des Flandres et les communes actuellement à facilités (comme Enghien) ne sont pas reprises. Inversement, toutes les communes qui alors étaient majoritairement francophones et qui se trouvaient en région flamande et maintenant en région wallonne sont reprises. Dans son livre, le journaliste flamand Pascal Verbeken utilise également ces chiffres pour montrer l'ampleur du phénomène.[réf. incomplète] Verbeken, comme Quairiaux, conviennent que cette migration fut très importante dans la genèse de la Belgique ou, au moins, pour la formation de l'identité de ses populations les plus importantes : les Wallons et les Flamands.
Dans les zones industrielles le long du Sillon Sambre-et-Meuse (la vallée industrielle entre Mons et Verviers), le Borinage (à l'ouest de la Wallonie) et la région autour de Verviers (dans l'est) sont moins impliquées par le phénomène tandis que les provinces du Brabant-Wallon, de Namur et Luxembourg ne le furent que très peu.
Les zones industrielles de Charleroi, Liège et la région du Centre autour de la Louvière sont les zones où l'immigration flamande fut la plus importante. Sur la période des recensements linguistiques publiés par Quairiaux, environ 500 000 Flamands migrèrent pour trouver du travail en Wallonie.
Communes de l'axe industriel en Wallonie avec la plus grande part de migrants flamands
Sur base des mêmes critères (néerlandophones et bilingues = Flamands), comme pour les chiffres par arrondissement, on peut sur base des recensements linguistiques, également retrouver la proportion de Flamands par commune à l'apogée de la métallurgie et de l'exploitation du charbon en Wallonie. Les proportions les plus élevées s'observent dans le bassin liégeois.
Bassin de Liège
- Glain appartenait jusqu'en 1874 à la commune d'Ans
- Bressoux appartenait jusqu'en 1871 à la commune de Grivegnée
Bassin de Charleroi
Bassin de La Louvière (Centre)
- Jusqu'en 1869, La Louvière faisait partie de la commune de Saint-Vaast.
- Jusqu'en 1880, Manage faisait partie de la commune de Seneffe.
Nota bene: Dans le nombre d'habitants, ne sont pas repris ceux déclarés ne parlant aucune langue, c'est-à-dire les enfants de moins de 2 ans et cela pour les recensements à partir de 1900.
Effet de l'immigration sur la littérature wallonne
La littérature wallonne (en tant que langue régionale) eut son siècle d'or durant le pic d'immigration flamande. Selon Steven Kellman c'est à cette époque qu'est apparue la littérature wallonne, que les pièces de théâtre et la poésie ont prospéré et que beaucoup de journaux et troupes de théâtrale furent fondées.
Notes et références
Notes
Source
- (nl) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en néerlandais intitulé « Vlaamse immigratie naar Wallonië » (voir la liste des auteurs).
Voir aussi
Bibliographie
- Michel Poulain et Michel Foulon, « L’Immigration flamande en Wallonie : Évaluation à l’aide d’un indicateur anthroponymique », Revue belge d’histoire contemporaine, vol. 12, nos 1-2, , p. 205-244 (lire en ligne, consulté le ).
- Guido Fonteyn (trad. du néerlandais par Erik Cuypers), Rue des Flamands : Le Périple des migrants flamands en Wallonie, Ottignies, Quorum, , 126 p. (ISBN 2-87399-016-3).
- (nl) Guido Fonteyn, Boerenpsalm : Vlaamse boeren in Wallonië, Anvers, Manteau-Standaard, , 165 p. (ISBN 978-90-8542-068-2).
- Idesbald Goddeeris (dir.) et Roeland Hermans (dir.), Migrants flamands en Wallonie : 1850-2000, Bruxelles, Racine, coll. « Campus », , 248 p. (ISBN 978-94-014-0146-3).
- (nl) Yves Quairiaux, « 2. Migratie naar Wallonië | Familiegeschiedenis », sur familiegeschiedenis.be (consulté le ).
- Pascal Verbeken (trad. du néerlandais par Anne-Laure Vignaux), La Terre promise : Flamands en Wallonie, Bègles, Le Castor astral, coll. « Escales des lettres », , 320 p. (ISBN 978-2-85920-801-1)
Liens externes
- (nl) Yves Quairiaux, « Vlamingen naar Wallonië : Een divers en eeuwenoud fenomeen », sur familiegeschiedenis.be, (consulté le ).
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